La migraine de l'autre jour (CINQ JOURS DE SUITE PTN) m'a appris un truc
Genre ça m'a fait réaliser mon rapport actuel à la douleur
Ça fait trois ans que je suis persuadé d'exagérer mes douleurs, de me plaindre pour rien, de prendre la douleur comme prétexte pour ne rien faire
Avant, je sentais pas vraiment la douleur, en tout cas pas celle de l'extérieur (coups, chocs, coupures etc), et là ça fait trois ans que je suis persuadé que c'est tout foutu en l'air
Mais cette putain de migraine, qui m'a tabassé la gueule pendant des jours, même pas à m'en taper la tête contre les murs pcq ça c'est mon état de base, mais genre j'étais là à foutre un foulard sur mon oeil parce que la lumière, pas pouvoir utiliser mon casque antibruit pcq déjà trop de pression, les veines saillantes sur le crâne et la face rouge vif, l'oeil et le nez qui arrêtent pas de couler tellement tout part en couilles, la moindre lumière, le moindre mouvement, le moindre oubli de respiration (et ça m'arrive plusieurs fois par minute), le moindre truc, paf ça lance dans l'oeil et le crâne comme jamais, et même les yeux fermés allongé dans le lit volets fermés et quasi aucun bruit bah ça défonce
Cette putain de migraine
Elle m'a pas empêché d'aller à un rdv psy, de reprendre un rdv, d'expliquer des choses
Elle m'a pas empêché de retourner à Lyon et d'aller à GRENOBLE nom de dieu, pour une journée de formation où fallait réfléchir tout le temps et avec des néons atroces et une cinquantaine de militant-es bruyant-es et en mouvement
Alors ouais elle m'a tabassé sévère et a salement compliqué les choses et puis réfléchir quand tout est brouillard et quand t'attends juste la mort c'est complexe, et même, le quatrième jour je me suis posé la question de est-ce que je devrais pas envisager de prendre un médoc (et si tu connais un peu mon rapport aux médocs tu sais que ça n'arrive *pas* dans ma vie)
N'empêche que j'ai fait tout ça, et sans médoc du coup hein, et genre
jsp
Le niveau de douleur était totalement ingérable, mais j'ai géré
C'était dans la tête en plus, donc ça complique tout parce que toute la vie implique l'utilisation intensive de la tête
Je crois que mon rapport à la douleur est toujours aussi fucké
Et toujours dans le même sens qu'avant
Je crois que le niveau de douleur normal pour moi est toujours aussi peu normal
10 mai.
Bon. J'crois qu'il va falloir qu'on parle, toi et moi. Parce que ça devient ridicule, cette histoire. Tu as mal. Tu as mal, et tu dis que c'est normal. C'est pas comme ça que ça marche. T'as mal à en crever, tu peux rien faire tellement tu douilles. Alors ouais, t'arriveras toujours à passer au-dessus et à quand même faire c'que t'as décidé de faire, et après tu t'étonneras toujours d'aller plus mal et d'être fatigué pour que dalle. Ouais, t'arriveras toujours à oublier que t'as mal, à pas te rendre compte d'une nouvelle douleur, d'un nouveau problème, parce que t'as trop l'habitude et parce que ton corps est flingué. Je sais, avec le SED c'est normal d'avoir mal partout tout le temps. Ouais. Mais ça veut pas dire qu'il faut rien faire pour soulager, et ça veut pas dire que tu dois ignorer l'ensemble des signaux de ton corps. C'est pas parce que t'as décidé que t'aurais mal que du côté droit, que tu vas effectivement souffrir que du côté droit. C'est pas parce que t'as décidé que ton côté gauche était solide, qu'il va être épargné. Va falloir que tu acceptes l'idée que, au-delà d'être handicapé, t'es aussi *malade*. Et t'as le droit de te soigner. Et si tu le fais pas, ça va empirer. Oui, ça a tendance à empirer avec le temps, c'est évolutif, blabla. Mais si tu fais de la merde, ça se dégrade plus vite. Là, ça fait un peu trop d'années que tu fais d'la merde. Y a eu les débuts, les positions rigolotes et les trucs chelou, porter des trucs en mode forçage total (ouais ouais j'pense aux sacs de sport des potes au collège, puis aux potes après, et à tous les trucs lourds). Y a eu les années à faire du stop et à dormir n'importe où, à pousser le corps à bout, à forcer, forcer, forcer jusqu'à épuisement, à ignorer toutes tes limites. Y a eu les années à pas bouger du canapé tellement tu peux plus rien faire, toujours dans des positions chelou parce que tu sais pas faire autrement. Bah oui, t'as mal. Et t'auras probablement toujours mal. Mais avoir mal, c'est pas une excuse pour refuser de te reposer. Plus tu retardes le repos, plus tu vas devoir te reposer au final. Plus tu refuses, plus tu fatigues, et moins tu peux faire ce qui t'intéresse (sans parler de la survie, mais ça, tu t'en fous). Regarde ton poignet. Nan, pas celui-là. Le gauche. Bah ouais, il commence à prendre cher, à force de prendre pour deux. Va falloir envisager de le prendre en compte. Ouais je sais, ça fait mal, ça aussi. Ah, et manger, c'est pas en option.
13 mai 2022.
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