Je sais plus comment parler, je sais plus comment écrire. J'ai plus les mots, plus les rires. Mes doigts s'effritent sur le clavier, mes os s'abîment sur le papier, ma tête s'oublie sur les pavés. Mes chevilles craquent et s'effondrent, mes poignets se bloquent et fondent, mes genoux grésillent et s'embrouillent, mon dos se plie et dérouille. J'ai mal, je vais mal. Je stagne, je tombe, je sombre. Est-ce que ça va ? Non, toujours pas. Et peut-être jamais.
Si tu savais, comme j'ai envie de crever. Si tu savais, comme ça me tente de tout arrêter. Parce que ça va pas, parce que tout fait si mal, si fort. Parce que je suis brisé, depuis trop longtemps. J'essaie de me reconstruire sur des murs qui tombent en poussière, avec des fondations oubliées, et je m'écroule.
J'ai mal, tu sais ? J'ai mal de tout ce que j'ai perdu, et de ce que j'ai jamais eu. J'ai mal de ma joie, de ma peine, j'ai mal de mes souvenirs et de mes oublis, j'ai mal de ma voix et de ma haine. J'ai plus les mots pour décrire mes mots, tout s'écoule loin de mes bras et s'accumule au fond de mon lit. Mes idées me fuient, mes pensées m'épuisent, mes douleurs m'enivrent.
Brisé, brisé. Broyé et déçu. Haché menu menu. Trop longtemps, trop longtemps sans tendresse, trop longtemps sans ton sourire. Ton rire sur ma peau et tes larmes sur mes os. J'ai pas les épaules, tu sais, pas les épaules pour encaisser, j'ai que mon sang pour renoncer. Je suis faible, tu sais ? Faible à en crever, faible à en pleurer.
Pourtant, il aurait suffi de pas grand-chose, pour que j'aie le courage. Il aurait suffi de presque rien, pour que je me relève, et t'enlève à tes peurs, t'élève sans rancoeur. Il aurait suffi, il aurait fallu. Mais je me noie dans ton absence, dans tes silences. Un jour, on plantera sur ma tombe la fleur de tes yeux clairs. Les miens se ferment, se ternent.
J'ai habité tes histoires, tu vis dans mes racontars, on se retrouve dans les fables dont je me berce tard le soir. Peut-être qu'il finira par venir, le temps où je te verrai au creux d'un arbre. On aurait pu partir, on aurait pu mourir, on aurait pu grandir, on aurait pu sourire. J'aurais voulu, tu sais. Dans mes chansons c'est encore ta voix que j'entends, dans mes pas ce sont les tiens qui résonnent. Parce que je n'existe jamais par moi-même.
Un rêve impossible, j'ai envie d'y croire. Un plan infaillible, je veux pas qu'ça foire. Une âme invisible, tes bras dans le noir.
J'ai rêvé de toi cette nuit, encore.
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