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Climat incestuel

J’suis fracassé d’la tête bon ça c’est pas nouveau

Aujourd’hui j’te raconte mon pire cauchemar d’enfance

Une pièce sombre genre cave neuve ou morgue d’hôpital

Même cabinet véto qu’est-ce que j’en sais au fond

Des instruments des fioles et une table en métal

Grand-père ch’mise à carreaux rouge et noir la pénombre

Le bébé sur cette table voit la scène de dehors

Et ma mère en retrait son rôle c’est d’ne rien faire


Y s’passe rien dans ce rêve c’est quand même terrifiant

Parce que même à quatre ans c’est l’ambiance qui m’pesait

Et franchement un gamin qui a ça dans la tête

Comme cauchemar récurrent moi j’t’avoue ça m’inquiète

Me réveiller en sueur d’une action immobile

Fuir les hommes à carreaux en allant à l’école

Mais pourquoi dans mes nuits ce poison cette menace

Y a une source à tout ça le climat incestuel


J’sais pas si on m’a violé j’peux pas t’dire j’tais trop jeune

Mais de tous les côtés ça suintait le malsain

Tous les grands-pères d’mon monde m’ont toujours fait flipper

Pour de très bonnes raisons l’inceste est dans mon sang

J’connais pas les détails et on saura jamais

Plainte avant ma naissance et tout le bataclan

Pis de l’autre côté pour les frères ou les sœurs

J’ai jamais bien compris ça change rien c’est l’climat


Tu t’éloignes de l’idée tu t’dis qu’tu l’aurais su

Si c’était arrivé ça traînait juste dans l’air

Tu t’rends compte que c’est sale quand t’en parles et qu’t’entends

Les mots qui sortent de toi t’as l’réflexe de défendre

De dire mais nan attends c’tait pas censé être crade

J’parle pas d’cul j’te dis juste que j’ai grandi avec

La sensation de n’être que l’objet d’mes parents

Et même un jouet entre eux mais nan c’est pas sexuel


Plus j’essaie d’rattraper tous ces sous-entendus

Malsains involontaires maladroits et mortels

Et plus je vois grandir le train qui m’fonce dessus

Pas b’soin qu’on m’ait touché pour m’avoir abusé

L’évidence est obscène elle met ses doigts partout

Parce que j’ai toujours su que c’était pas normal

Que quelque chose clochait que quelque chose craignait

Si la nausée déviante m’a bercé c’pas pour rien


J’me souviens d’tous ces mots ces anecdotes dégueu

De lui d’ses meufs d’ses potes il m’en racontait trop

J’ai jamais eu la place d’un enfant avec lui

C’était valorisant d’être vu comme mature

Mais comment évoluer comment grandir mûrir

Quand on t’a déjà mis dans la case des adultes

On te dit qu’t’es fini alors pour avancer

C’est coton faut briser ce qui a été là


Mon grand frère et sa mère une grande histoire de quoi

Il a été un père sans doute plus que le mien

Bien sûr un père absent brillant par sa froideur

L’a toujours été vieux je l’ai connu qu’adulte

Pas sain pour un enfant d’être père de famille

Pas sain pour un ado de vieillir sans grandir

Mais j’le connaissais pas j’sais pas c’qui s’est passé

J’ai juste senti l’ambiance et le poids des silences


Parlons de l’autre frère et de l’amande amère

Qui lui sert de langue dure coupante comme un rasoir

Ses mots et ses regards qui s’insinuent trop loin

Jusqu’aux larmes de sang qu’il n’aurait pas dû voir

Il harcèle et caresse insatiable et menteur

Tout c’qu’il sait est une arme et il n’a jamais peur

De briser l’innocence d’abîmer la pureté

Les doigts sales de sa voix me poursuivent m’empoisonnent


J’pourrais écrire des livres pour dire ce qu’il m’a fait

Pour raconter les mots le venin de sa langue

La violence de ses gestes ses menaces et ses cris

Il a tout répété tant de fois que j’oublie

Mais la phrase qui me hante n’a existé qu’une fois

Au volant d’sa voiture son bébé à l’arrière

Et là il me balance la pire phrase de ma vie

Une seule fois et pourtant je m’y étrangle encore


Parfois j’me dis qu’ces rêves ces cauchemars ces nuits blanches

Ça vient bien d’quelque part ç’a forcément du sens

À quoi me raccrocher ma mémoire a des trous

Mais si j’me souviens pas qu’on m’ait touché c’est pas

Une preuve indubitable qu’c’est jamais arrivé

Sauf qu’au fond l’important c’est pas ça pas d’savoir

Jusqu’où ç’a pu aller sur un gosse un bébé

Nan c’qui compte c’est qu’je fuis dès qu’on m’touche qu’on m’sourit


J’ai encore sur la peau le goût de tous leurs mots

Pour toujours j’suis sali de ces phrases ces injures

Ces menaces ces horreurs ces regards ces erreurs

Leur dégoût leur colère j’leur fais honte et j’m’en fous

Ces gens m’ont arraché un avenir tout tracé

Que je n’ai jamais eu je pleure ce disparu

Leurs actes sont éloquents et ce climat violent

A ancré dans mon âme le goût de la douleur


6 septembre 2025.

 
 
 

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