Climat incestuel
- leoapwal69
- 18 sept.
- 3 min de lecture
J’suis fracassé d’la tête bon ça c’est pas nouveau
Aujourd’hui j’te raconte mon pire cauchemar d’enfance
Une pièce sombre genre cave neuve ou morgue d’hôpital
Même cabinet véto qu’est-ce que j’en sais au fond
Des instruments des fioles et une table en métal
Grand-père ch’mise à carreaux rouge et noir la pénombre
Le bébé sur cette table voit la scène de dehors
Et ma mère en retrait son rôle c’est d’ne rien faire
Y s’passe rien dans ce rêve c’est quand même terrifiant
Parce que même à quatre ans c’est l’ambiance qui m’pesait
Et franchement un gamin qui a ça dans la tête
Comme cauchemar récurrent moi j’t’avoue ça m’inquiète
Me réveiller en sueur d’une action immobile
Fuir les hommes à carreaux en allant à l’école
Mais pourquoi dans mes nuits ce poison cette menace
Y a une source à tout ça le climat incestuel
J’sais pas si on m’a violé j’peux pas t’dire j’tais trop jeune
Mais de tous les côtés ça suintait le malsain
Tous les grands-pères d’mon monde m’ont toujours fait flipper
Pour de très bonnes raisons l’inceste est dans mon sang
J’connais pas les détails et on saura jamais
Plainte avant ma naissance et tout le bataclan
Pis de l’autre côté pour les frères ou les sœurs
J’ai jamais bien compris ça change rien c’est l’climat
Tu t’éloignes de l’idée tu t’dis qu’tu l’aurais su
Si c’était arrivé ça traînait juste dans l’air
Tu t’rends compte que c’est sale quand t’en parles et qu’t’entends
Les mots qui sortent de toi t’as l’réflexe de défendre
De dire mais nan attends c’tait pas censé être crade
J’parle pas d’cul j’te dis juste que j’ai grandi avec
La sensation de n’être que l’objet d’mes parents
Et même un jouet entre eux mais nan c’est pas sexuel
Plus j’essaie d’rattraper tous ces sous-entendus
Malsains involontaires maladroits et mortels
Et plus je vois grandir le train qui m’fonce dessus
Pas b’soin qu’on m’ait touché pour m’avoir abusé
L’évidence est obscène elle met ses doigts partout
Parce que j’ai toujours su que c’était pas normal
Que quelque chose clochait que quelque chose craignait
Si la nausée déviante m’a bercé c’pas pour rien
J’me souviens d’tous ces mots ces anecdotes dégueu
De lui d’ses meufs d’ses potes il m’en racontait trop
J’ai jamais eu la place d’un enfant avec lui
C’était valorisant d’être vu comme mature
Mais comment évoluer comment grandir mûrir
Quand on t’a déjà mis dans la case des adultes
On te dit qu’t’es fini alors pour avancer
C’est coton faut briser ce qui a été là
Mon grand frère et sa mère une grande histoire de quoi
Il a été un père sans doute plus que le mien
Bien sûr un père absent brillant par sa froideur
L’a toujours été vieux je l’ai connu qu’adulte
Pas sain pour un enfant d’être père de famille
Pas sain pour un ado de vieillir sans grandir
Mais j’le connaissais pas j’sais pas c’qui s’est passé
J’ai juste senti l’ambiance et le poids des silences
Parlons de l’autre frère et de l’amande amère
Qui lui sert de langue dure coupante comme un rasoir
Ses mots et ses regards qui s’insinuent trop loin
Jusqu’aux larmes de sang qu’il n’aurait pas dû voir
Il harcèle et caresse insatiable et menteur
Tout c’qu’il sait est une arme et il n’a jamais peur
De briser l’innocence d’abîmer la pureté
Les doigts sales de sa voix me poursuivent m’empoisonnent
J’pourrais écrire des livres pour dire ce qu’il m’a fait
Pour raconter les mots le venin de sa langue
La violence de ses gestes ses menaces et ses cris
Il a tout répété tant de fois que j’oublie
Mais la phrase qui me hante n’a existé qu’une fois
Au volant d’sa voiture son bébé à l’arrière
Et là il me balance la pire phrase de ma vie
Une seule fois et pourtant je m’y étrangle encore
Parfois j’me dis qu’ces rêves ces cauchemars ces nuits blanches
Ça vient bien d’quelque part ç’a forcément du sens
À quoi me raccrocher ma mémoire a des trous
Mais si j’me souviens pas qu’on m’ait touché c’est pas
Une preuve indubitable qu’c’est jamais arrivé
Sauf qu’au fond l’important c’est pas ça pas d’savoir
Jusqu’où ç’a pu aller sur un gosse un bébé
Nan c’qui compte c’est qu’je fuis dès qu’on m’touche qu’on m’sourit
J’ai encore sur la peau le goût de tous leurs mots
Pour toujours j’suis sali de ces phrases ces injures
Ces menaces ces horreurs ces regards ces erreurs
Leur dégoût leur colère j’leur fais honte et j’m’en fous
Ces gens m’ont arraché un avenir tout tracé
Que je n’ai jamais eu je pleure ce disparu
Leurs actes sont éloquents et ce climat violent
A ancré dans mon âme le goût de la douleur
6 septembre 2025.
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